LE CODE DE YESCHOUAH HA-NAZIR
« Quel est le premier de tous le commandements ? Jésus répondit :
Voici le premier : Ecoute Israël, le Seigneur, notre Dieu, est l’unique Seigneur ; et : Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton coeur, de toute ton âme, de toute ta pensée, et de toute ta force.
Voici le second ; Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Il n’y a pas d’autre commandement plus grand que ceux-là. »
(Marc 12, 28-32)
Au troisième millénaire, Jésus (Yeschouah) n’a plus la même actualité que dans les deux précédents, et ce recul nous permet de considérer la question judéo-chrétienne comme l’expression d’une dualité non résolue.
Grâce à la théorie du Zodiaque précessionnel, plus une philosophie de l’évolution humaine dans l’histoire de ses religions qu’un déterminisme, nous pouvons jauger la marque de fabrique de l’ère des Poissons (0), qui accoucha de l’ère du Bélier (-2160) sous l’égide des lois du Dieu de l’Egypte et d’Israël.
Mythe fondateur de Jésus-Christ, succédant à la longue tradition d’Osiris, vieille de trois millénaires en Egypte et au Moyen-Orient : fils de Dieu, issu d’une Vierge et de l’Esprit-Saint, destiné à mourir pour racheter les fautes de l’humanité, afin de renaître en semant l’espérance. De fait, Gardien d’équilibre cosmique dans la lignée sacerdotale de Pharaon Intercesseur, Noé-Shem, MelkiTsédek, et dans une moindre mesure, Saint Michel, la Geste arthurienne, le retour récurrent du Roi…
«Avant qu’Abraham fut, Je suis» (Jean 8, 58), est une autre signature de Jésus-Christ, la concordance avec l’obligation et la finalité de la Justice en marche, exprimée dans l’axe précité, en alfa et en oméga de la logique du Second Principe (-4320 / +2160) de ce Zodiaque, où semble se terminer le concept préhistorique de l’éternel retour cher à Mircéa ELIADE.
Soit, la régénération périodique de la vie ramenant toujours à la création primordiale du monde, au commencement absolu repris par la Bible, à la plénitude d’un présent sans trace d’histoire, régénérant la pureté et l’intégrité originelles du temps. Ce schéma inclus dans le Premier Principe zodiacal (-12960 / -6480) fut repris par le mythe osirien jusqu’à Jésus-Christ, permettant l’espérance de la résurrection des morts.
«Mon Royaume n’est pas de ce monde» (Jean 18,36) disait Jésus-Christ ; qu’est-ce à dire ? Pour un présumé Libérateur et Roi des Juifs, son Royaume est le Ciel (Kéther), et non pas la Terre d’Israël (Malkhouth), le but de l’Arbre de Vie ? De fait, cette classification kabbalistique lui est largement postérieure.
D’ailleurs, selon Alfred LOISY, excommunié par son affirmation « Jésus annonçait le Royaume, et c'est l'Église qui est venue… » exprime en partie cette dialectique sous-jacente.
Rappelons aussi la ligne du courant pharisien hillélite à Yabné à partir de 70, succédant à : « Ainsi parle YHVH : le ciel est mon trône et la terre mon marchepied » (Is. 66,1) - 600 / -500. « Dieu est Roi, au-dessus du monde que le mystique doit dépasser pour entendre Sa parole et deviner Sa Gloire. » (4) Nous avons ici comme ailleurs la grande continuité du judaïsme.
Yeschouah est ben Adam, fils de l’homme, soit la pure humanité, mais traversé par le Logos divin, donc Fils de Dieu à ce titre comme l’instrument de son programme.
Le Royaume des Cieux est bien l’union avec le Dieu créateur et éternel, contrairement aux autres royaumes et empires périssables (cf. Livre de Daniel). Le sens ontologique n’est pas le sens politique.
Pourtant, la libération d’Israël colonisée par les Romains n’était-elle pas prioritaire ? Non, puisque les Chrétiens convertirent certains Romains et les intégrèrent dans leur communauté. Leur stratégie était l’avènement d’une humanité nouvelle à l’image du Créateur. Le saut qualitatif porteur d’une nouvelle civilisation s’accomplit à ce moment. Il ne s’agissait plus de répondre à l’agression par l’agression, mais par la création, le pardon et l’amour.
Sauf « chez Luc (21, 20-28) : Jérusalem se libèrera quand le temps des nations aura été achevé.
Ce sera alors la fin des temps, il faudra relever le tête, car la délivrance sera proche. (…), et uniquement là, que cette prophétie de Jésus a conservé (…) son caractère original : celui d’une libération du peuple juif vis-à-vis de la domination étrangère. Jésus, fils d’Israël, lui a annoncé non pas sa conversion, mais bien sa délivrance. » (1)
Difficile à tout croire aveuglément, à moins de considérer que Jésus-Christ fut l’acteur obéissant et conscient d’une logique supérieure visant à imposer pour plus de 2000 ans une certaine Loi du Ciel sur Terre. Elle serait la preuve tangible de sa véritable résurrection, l’avènement de la civilisation judéo-chrétienne, et entre autres en final, source du modèle de la République laïque occidentale.
- « Je ne suis pas venu abolir la Loi mais l’accomplir. » (Matthieu 5, 17), disait-Il ?
« Crois-tu que je ne puisse pas faire appel à mon Père, qui mettrait aussitôt à ma disposition plus de douze légions d’anges ? Mais alors, comment s’accompliraient les Écritures ? D’après elles, c’est ainsi que tout doit se passer. » - Lettre de Saint Paul Apôtre aux Philippiens (2, 6-11).
NB : 12 = allusion implicite au Zodiaque, au destin prédéterminé par le plan cosmique ?
Et au prix de son sacrifice suprême, dans cette mise en scène-là, Jésus est bien Fils de Dieu, dont personne ne lui disputera la place.
Ce type de raisonnement a posteriori n’est pas accessible au plus grand nombre. Alors on simplifie, sans réexpliquer, quitte à créer de mortels sous-entendus. Le sens commun déteste la complexité.
Prenez par exemple la question de la réincarnation, qui ne s’appliquerait qu’à des groupes spirituels organisés avec de puissants égrégores (Dalaï-Lamas tibétains, Egyptiens, Templiers, etc.), voire même à des exceptions. A notre époque, le mécanisme de la mémoire de l’ADN, de la psychologie transgénérationnelle sont connus, mais insuffisamment développés face à cette croyance durable de complaisance, continuant à faire recette de fainéantise intellectuelle.
Le véritable visage de Yeschouah reste infini à force d’interprétations et de projections humaines : proche des Esséniens, thérapeute d’Alexandrie, thaumaturge, vu en Inde ou au Tibet, etc. Rappelons quand même, en raison d'une erreur de transcription calendaire, qu’il était né de fait en - 6 ou - 7, soit 2-3 ans avant la mort d’Hérode le Grand en - 4. Il était âgé de 33 ans à sa crucifixion.
Son humanité lui donne une extraordinaire proximité dans le coeur de tout un chacun, quelle que soit son origine. Mais sans jamais quitter le surnaturel vers l’obligation de justice évoquée : Christ-Roi, il reviendrait à la fin des temps pour rétablir l’ordre, dans la logique du miracle permanent, de la balance eschatologique perpétuelle.
Cependant, il y a bien deux dimensions à considérer :
- le personnage juif porteur de sa tradition avec son message révolutionnaire de l’époque : Yeschouah,
- Christ le ressuscité, porteur d’un courant spirituel que Saül-Paul transforma en religion, devenant religion d’état sous l’empereur Constantin, pour aboutir au triomphe de l’Eglise de Rome, et du Vatican.
Pour un croyant, il est absurde de séparer Jésus du Christ : pourtant c’est la césure artificielle que je choisis pour vous en parler utilement, avec d’autres.
« Jésus n’était pas chrétien ! Il n’a jamais mis les pieds dans une église et, aujourd’hui, il entrerait plus facilement dans une synagogue dans laquelle il se reconnaîtrait plus facilement que dans une cathédrale. » (2) - (préface d’Armand ABECASSIS),.
« Ne pourrait-on enfin considérer que Jésus n’a jamais mis les pieds dans une église, ni lu les Evangiles, ni communié ni même parlé et enseigné qu’en hébreu ou en araméen ? »
Et même : « Jésus le Juif désirait-il être LE Christ ? Ou encore, LE Christ n’est-il pas la rupture radicale avec le judaïsme, contrairement à Jésus qui incarnerait la continuité ? Dans l’affirmative, nous serions conduits à conclure que LE Christ est, malgré son nom, une élaboration purement spirituelle caractéristique d’une nouvelle religion. « (3)
Disons que la rupture s’est produite en 70 ap. JC à la destruction du second Temple. Avant, le courant de Jésus était l’un parmi d’autres du judaïsme de cette époque. Après, la normalisation s’effectua dans les deux religions. Les Pharisiens, eux, durcirent au I° siècle leurs positions face aux Judéo-Chrétiens, etc.
« Même si les critiques de Jésus à l’encontre de certaines expressions du judaïsme de son temps étaient par moment virulentes, c’était là des critiques de l’intérieur nourries de l’ahavat Israël (l’amour d’Israël). Jésus a vécu dans la foi juive et il est mort pour elle. Il est né « sous la loi » (Epître aux Galates 4,4) et n’a voulu ni corriger ni réformer le judaïsme.(…)
Jésus n’a pas fondé une conception nouvelle de la divinité. Son Dieu était celui d’Israël. (…)
En bref, Jésus n’entendait pas s’écarter du judaïsme et sa vie s’est déroulée dans l’esprit de la halakha. » (1)
Il n’était pas venu abolir la Loi, dont acte. Pharisien lui-même s’opposant à d’autres pharisiens, courant religieux porteur d’expressions multiples, tout en mettant en avant les principes et la pratique plus que la lettre.
Par la suite, après 70, « le christianisme primitif s’est très vite imposé comme une religion à propos de Jésus très éloignée de la religion pratiquée et élaborée par Jésus. (…) le christianisme s’est fondé lui-même.» (1).
Néanmoins, la question reste posée : « vous pouviez trouver en Israël et en hébreu, avant l’époque de Jésus, des tendances qui ressemblent beaucoup à celles qui existaient en milieu grec, chez les juifs d’Alexandrie. Alors il devient difficile de dire que Paul a commis un rapt sur le christianisme. Et il est encore plus difficile de dire par exemple que Jésus n’a jamais pensé qu’un Gentil puisse être sauvé, que la sainteté fut partout ou que les commandements pratiques pussent être abandonnés. Car vous trouvez des Juifs de la même époque qui écrivent en hébreu et qui manifestent des tendances similaires.
Il devient donc plus malaisé de jouer à ce jeu commode du Jésus-qui-serait-un-Juif-à nous et dont le judaïsme se serait éloigné. On ne peut plus dire après Qûmran que le christianisme a subi une mutation radicale après Jésus au point que le christianisme ne serait pas la religion de Jésus. On peut le regretter mais c’est ainsi.
(…)
Aujourd’hui, on voit bien qu’il y a un universalisme à Qumrân, un spiritualisme à Qumrân, une tension autour des commandements à Qûmran.
(…)
De même, les Esséniens voient dans Melchisédech une figure de sauveur, une figure de messie. Or Melchisédech est un Gentil, il n’est pas juif et encore moins descendant de David. Certains textes le situent au-dessus d’Abraham. »
(…)
« La bonne nouvelle des Evangiles n’a pas laissé d’empreinte sur les Juifs pour la bonne raison qu’il n’y avait là rien d’inconnu pour eux. »
(…)
« Jésus est né juif, a vécu en juif, et est mort en juif. » (Joseph KLAUSNER) (1)
Quant à son procès, il semble désormais admis qu’il fut condamné à mort par le Sanhédrin à majorité saducéen qui le livra aux Romains, qui eux délivrèrent leur propre sentence de mort pour crime de lèse-majesté de Yeschouah Roi des Juifs envers César.
Il reste toujours surprenant de considérer que cette histoire purement interne au peuple juif a pu autant dégénérer contre lui en le qualifiant de déicide, alors que la mort de Jésus-Christ a permis sa résurrection et l’accomplissement de la promesse messianique et universelle.
L’histoire est pour le moins cruelle. Tout se paye et au prix fort. Toute révélation passe un jour dans le domaine public, et gare aux retours de bâton. Surtout quand on passe du spirituel au politique, de l’intérêt individuel et populaire à la logique des empires. Les premiers Chrétiens, les Juifs et les Palestiniens en ont fait l’expérience chacun leur tour. La loi humaine, et rien d’autre.
LA QUESTION ESSENIENNE
Un éclairage singulier sur le lien possible entre Jésus et la secte de Qumrân : L'autre Messie d'Israël KNOHL (Albin Michel, 2001).
Selon l'école des études bibliques néo-testamentaires "Jésus ne s'est pas lui-même identifié aux figures messianiques du fils de l'homme du livre de Daniel et du serviteur souffrant d'Isaïe 53. L'identification aurait été faite, après sa mort, par des disciples." L'auteur, directeur du département biblique à l'Université hébraïque de Jérusalem, raisonne en sens inverse :
"Je pense que les hymnes messianiques de Qumrân remettent en question ces conclusions. Le héros des hymnes revendique un statut divin. Il prétend être supérieur aux anges et se décrit siégeant dans les cieux entouré d'anges, se comparant donc clairement au Dieu de la Bible. En même temps il se décrit comme méprisé et rejeté des hommes. (...) L'interprétation messianique d'Isaïe 53 n'a donc pas été découverte par l'Eglise chrétienne. Elle a été développée auparavant par le Messie de Qumrân. En vertu de ces faits, il apparait envisageable de considérer que la description de Jésus comme une association du fils de l'homme et du serviteur souffrant n'est pas une invention ultérieure de l'Eglise.(...)
L'enseignement de Jésus était clairement pharisien et hillélien avec sa propre personnalité. Par contre, son statut de Messie-Christ relevait d'un autre courant.
"L'idée d"un Messie souffrant existant déjà une génération avant lui." La secte essénienne avait historiquement deux Messies, l'un royal et l'autre sacerdotal, Ménahem, tués par les Romains en - 4 JC. De fait peu après la naissance de Jésus (cf. erreur calendrier).
Cependant "l'idée d'un Messie ou fils de l'Homme souffrant, mourant et ressuscitant semblait inconnue du judaïsme" a postériori. Pourtant "Jésus s'attendait à ce que le sort du fils de l'homme soit le même que celui du Messie de Qumrân, tué par les soldats romains. Et il s'attendait aussi à ce que le fils de l'homme se relève après trois jours, tout comme on croyait qu'il en était advenu pour le Messie de Qumrân ressucité après le troisième jour."
Ainsi, la vocation messianique de Jésus, du début jusqu'à la fin, porte l'empreinte du messianisme essénien de Ménahem. Et Jésus, Fils de Dieu ?
Là encore, la naissance virginale du Messie, son origine divine, l'annonce faite à Marie par l'Ange Gabriel, semblaient étrangères à l'Ancien Testament et au judaïsme de l'époque, et de facture hellénistique postérieure. Pourtant ce concept théandrique est essénien, élaboré en Terre d'Israël, au dernier siècle avant JC !
De plus, la tension historique avait exacerbé l'attente messianique entre Jérusalem et Rome, avec Octave-Auguste, fils de César entre -44 (son assassinat) et -31 av. JC (la bataille d'Actium contre Antoine et Cléopâtre). Et en ajoutant la promesse de la Quatrième Bucolique de Virgile, publiée en -40 av. JC, et annonçant le Nouvel âge.
En final, d'interprétationen interprétation, la boucle est bouclée, le puzzle assemblé. Tôt ou tard le besoin messianique de l'homme, créé à l'image de Dieu, est rempli.
LE PREMIER COMMANDEMENT
Le premier commandement de Yeschouah est « Shéma Israël - Ecoute Israël », soit le lien indéfectible avec la tradition qu’il porte en tant que Pharisien même révolutionnaire. Pour un catholique moyen, cette injonction ne signifie rien.
« Jésus rappelle que vivre la foi sur un mode vertical est indissociable d’un vécu sur le plan horizontal. Les deux commandements sont indissociables » (2)
De fait, Yeschouah est un monde, une culture ; le Christ, surtout par la suite, c’est tout autre chose, le message, la religion de Rome, etc., de plus en plus contradictoire et antagonique avec l’énergie originale.
Les origines juives du Christianisme continuent de poser problème au Vatican (cf. L’Apocalypse de J.MORDILLAT et G.PRIEUR). J’oserais dire que ceux qui veulent connaître de fait Yeschouah un tant soit peu sont invités à entrer dans une synagogue, traditionnelle pour l’étude de la Torah, et libérale pour l’ouverture. Quant à s’approcher du Christ, les églises de tous bords ne manquent pas.
Ceci m’a paru évident à un office de shabbat à la synagogue de Liège, quand j’ai vu le jeune fils du rabbin jouant avec ses tsitsit (franges), alors que son père s’apprêtait à ouvrir l’Arche de la Torah. Impensable dans une église au même titre que les bonbons que l’on jette sur l’assemblée à une Bar / Bat Mitsvah. Sans parler du pain et du vin du Kidouch, de la collation du partage indispensable au shabbath, qui n’a rien à voir avec le « dimanche », etc.
Alors que encore dans bien des églises catholiques, standardisées, coincées ou encore mortifères dans le passé, on peine encore à se toucher la main pour se donner la paix, etc. Certes, parfois, on lève l’Evangile, comme la Torah. Et quant au parcours alfa chrétien, vers quel oméga allez-vous ? Une même Bible, deux Testaments, et surtout des univers bien distincts. Bien entendu, chez les protestants, orthodoxes, charismatiques, c’est différent, mais minoritaire.
Quitte à être iconoclaste, allons jusqu’au bout. Jésus c’est comme le Canada Dry : le Christ y ressemble plus ou moins, mais ce n’est pas vraiment lui. Le peuple à la nuque raide n’est plus celui que l’on croyait. La pensée chrétienne semble s’être arrêtée après Teilhard de CHARDIN, le personnalisme d’Emmanuel MOUNIER actif jusque dans les années 80.
Aujourd’hui, c’est sûr, le Royaume de Yeschouah n’est pas vraiment celui du Christ. Le premier représente malgré tout l’idée du judaïsme, et le second l’esprit du christianisme. La connaissance de la Torah vous aidera à mieux comprendre et goûter la saveur originelle du Nouveau Testament, mais non l’inverse. C'est ainsi.
Et libres à ceux qui veulent continuer à croire que le Messie n’avait ni frère et soeur, ni épouse, etc. Possible pour un clone qui s’appelle Christ. Mais impensable à son époque pour un rabbin. Sinon, en Orient, un homme sans femme est au mieux un infirme ; impossible dans sa position dite de lignée davidique. « Tout juif (ou quiconque) n’a pas de femme ne peut être appelé un homme. » (Talmud, Yebamot).
Aussi, pour entrer dans le vif du sujet, je vous propose le dévoilement des Evangiles, pensés certes en hébreu, mais écrits en grec. La lecture en surface est l’arbre qui cache le contenu de la forêt du sens en profondeur.
LE CHRIST HEBREU
Rendons hommage à Claude TRESMONTANT (1925-1997), professeur émérite à la Sorbonne qui a remis les pendules des Evangiles à l’heure hébraïque.
Dans Le Christ hébreu (Albin Michel, 1992), la démonstration est faite que les Evangiles (Marc, Luc, Matthieu, Jean), et L’Apocalypse, ne furent pas rédigés en grec entre 70 et 120, mais en hébreu entre 33 et 60 ; quitte à les traduire ensuite dans une langue grecque, véritable décalque de la précédente (« l’hébreu déguisé en grec »).
« L’entrée massive des païens dans la Nouvelle Alliance commence en 36-40 ap. J-C (…) A la fin du I° siècle de notre ère, les églises, les communautés chrétiennes du bassin de la Méditerranée sont en majorité d’origine païenne, à 80 ou 90 %. »
Yeschouah Ha-No(t)zeri, Jésus le Nazir, Celui qui est consacré à Dieu, appellation à reconsidérer en creux à celle dite de Nazareth, parlait en araméen au peuple, et en hébreu aux lettrés. Ceux la même qui vont transcrire confidentiellement ses paroles dans des manuscrits rares qui n’auraient pas encore été découverts (cf. Qûmran). Tant que le Temple existait, personne ne se serait risqué à rédiger les Evangiles en tant que tels en araméen populaire.
NB : Christ est le Messie oint de l’huile sainte.
La preuve de ce décalage des Evangiles dans le temps est que les événements majeurs n’y sont pas répertoriés :
Ni Marc, Matthieu, Luc ou Jean ne semblent connaître et rapporter la prise, l’incendie et la destruction de Jérusalem et du Temple en 70 ap. J-C, ce que d’ailleurs Yeschouah avait annoncé dès 30 (4). Impensable alors que ces faits majeurs ne soient pas confirmés après cette date.
Marc et Luc ignorent les persécutions et le massacre des chrétiens par Néron et ses successeurs dès 64-65 dans tout l’Empire,
Marc et Luc passent sous silence la mise à mort de Jacques, le frère du Seigneur, premier évêque de Jérusalem, en 62 sur ordre du Grand Prêtre Hanan.
etc, etc.
Pour le reste, la longue liste d’exemples du florilège de l’auteur, du passage de certaines expressions de l’hébreu en grec non classique, laissera pantois de découverte plus d’un lettré. Et même, parfois, un mot hébreu est retranscrit tel quel en grec ancien !
En conséquence, « nous ne possédons pas dans les quatre Evangiles la plénitude de ce qu’a été, de ce qu’a dit, de ce qu’a fait le Seigneur. Son enseignement était donné en hébreu ou en araméen. Il nous est transmis en langue grecque. Il y alerte d’information, dans la transmission. En langage moderne de la théorie de l’information, il y a croissance de l’entropie. »
La théorie du Zodiaque précessionnel, elle, s’alimente ainsi toute seule :
« Saint Paul va se faire le théoricien de ce processus de la communication de l’Information créatrice d’abord confiée aux peuple hébreu, pendant quelques vingt siècles, puis passée à l’humanité entière. Comme chacun sait, la séparation entre le judaïsme et le christianisme s’effectue en ce point et à ce propos. »
Dont acte, soit de -2160, l’ère du Bélier à l’An 0, l’ère du Poissons = Ichthus, le symbole de Yeschouah !
L’APOCALYPSE
(Cf. Enquête sur l’Apocalypse de Claude TRESMONTANT - Ed. FX de Guibert)
Pour information, l’Apôtre Jean, qui joua un rôle capital dans la vie de Jésus, correspondrait à deux personnes :
1) le fils de Zébédée - et frère de « Jacques »,
2) « Celui que Jésus aimait », de fait un Cohen peut-être saducéen, qui écrivit L’Apocalypse dans les années 50 ap. J-C., en la commençant par son célèbre Prologue, « Au Commencement était le Verbe… », commentaire théologique sur Bereshit Bara Elohim… Question de profil, sûrement.
Car il serait Iohanan ou Ionatan Ben Hanan, pas moins que Cohen Gadol (comme son père le Grand Prêtre Hanan), nommé en 36 et déposé en 37 par le même Vitellius. Il refusa l’offre d’Hérode Agrippa I de le redevenir en 44 ; son frère Matthias le remplaça. Il fut assassiné en 54-55 sur l’ordre du Procureur Félix sous le règne de Néron (54-68).
Il aurait accueilli la Cène de Yeschouah chez lui à Pessah avant son arrestation, et aurait accompagné Saül-Paulus.
« Bien évidemment, si l’Apocalypse annonce que la Ville sainte, c’est-à-dire Jérusalem sera piétinée par les nations païennes, ou que les nations païennes piétineront Jérusalem, c’est que l’Apocalypse a été écrite et composée quelques années avant la prise et la destruction de Jérusalem. » (en 70).
Texte datant des persécutions du Clergé de Jérusalem : plus l’annonce de la fin d’un monde (l'hébraïque), que l’eschatologie du monde. Bien sûr, cela servira à une extrapolation future à toute une littérature basée sur la loi des cycles. NB : 666 = Vav-Vav-Vav, soit la Bête : plus la dynastie des sept Hérodes que Néron.
HoRoDoS : 3 x o (Omicron) = 3 x Vav, la 6° lettre de l’alphabet hébraïque.
La communauté chrétienne sur place prendra la fuite en 66.
LE MIDRASH JUIF
Par chance, un jour, je suis tombé un jour sur le livre plutôt confidentiel Un étranger sur le toit - les sources midrashiques des Evangiles de Maurice MERGUI (Ed. Nouveaux Savoirs, 2003).
Vu sa bibliographie fournie, il n’en est pas à son coup d’essai. Et je vous laisse découvrir son site non moins décapant www.lechampdumidrash.net
Au programme de ce livre :
« On trouve dans la littérature juive classique appelée midrash, des passages qui ressemblent étrangement aux narrations évangéliques. Les Evangiles seraient-ils un prolongement du midrash juif ?
En approfondissant cette hypothèse, le présent essai montre qu’il est possible d’expliquer de nombreux passage des Evangiles par leurs parallèles dans la littérature juive classique.
Cet essai propose une nouvelle lecture des Evangiles, et aboutit aux conclusions suivantes :
Le Nouveau Testament est un texte de même nature que le midrash juif.
Le Nouveau Testament fonctionne en permanence sous le régime de la double entente.
Il traite de l’eschatologie et ne peut fournir d’assise à aucun élément historique.
Tous ses matériaux sont déjà présents dans le midrash juif.
Les nombreux périscopes (unités narratives) qui composent les Evangiles peuvent être réduites à un très petit nombre de périscopes génériques.
Les guérisons forment le véritable noyau des Evangiles. Les récits de la naissance et de la Passion sont secondaires.
Ces guérisons sont une métaphore de l’entrée des païens dans l’alliance.
Le thème de l’allégement de la Loi est un thème central des Evangiles. Il est un prolongement des débats internes au Judaïsme, ainsi que l’atteste le midrash sur le livre de Ruth.
Le texte du Nouveau Testament produit ses narrations selon un véritable cahier des charges. Son lexique et sa rhétorique obéissent à un code relativement rigide.
Le Christianisme s’est édifié sur une lecture univoque de textes à double entente. Après trois traductions majeures, et la perte de lecture midrashique, le lecteur actuel n’a aucun moyen de revenir au sens originel. »
NB : « Le Christianisme s’est établi sur un malentendu reposant lui-même sur l’absence de cette double entente. » (p. 114)
Regardons d’un peu plus près. « La totalité des Evangiles est un Midrash… » Qu’est-ce à dire ?
D’abord, à quoi sert le Midrash, le commentaire herméneutique linéaire sur la Bible, l’interprétation permanente ?
« C’est par le Midrash que nous nous assurons que nous ne sommes pas Dieu. » (3). La pensée juive met l’accent sur la question plus que la réponse ; il n’est pas bon que l’homme se prenne pour lui-même ou plus que lui-même, etc.
Il faudrait donc deviner l’hébreu sous le grec pour lire l’Evangile pour de bon, en l’interprétant comme un midrash, un commentaire juif. Et là on se retrouve face au double sens, au principe de la double entente, la lecture aux 1° et 2° degrés sur le sujet crucial de l’époque :
D’une part « l’apparence » historique, d’autre part les paraboles des guérisons et des conversions cachant à peine la version originale : l’inversion eschatologique Juifs / Païens - Chrétiens. Les premiers ne méritent plus tout-à-fait, et doivent se mélanger avec les seconds pour ouvrir l’Alliance universelle de l’humanité.
La Torah s’allège sous le symbole de l’hostie ou devient caduque ; la circoncision devient celle du coeur. La religion juive ne risque-t-elle pas alors de disparaître ?
En esprit et en vérité, les seconds ont besoin des premiers pour être sauvés et réciproquement. « A la fin des temps, les prosélytes viennent rejoindre Israël, et tous ne forment plus qu’un seul peuple. Les idolâtres seront alors guéris de leur idolâtrie. » Et ainsi opérer la re-création du monde en le convertissant, du peuple de la techouvah à ceux de la métanoïa.
Tout semble écrit depuis le départ : Bereshit Bara Elohim… Au Commencement, en-tête, dans le Principe. A ce sujet, n’assistons-nous pas là au processus logique d’un Big-Bang spirituel succédant au précédent ?
NB : L’ennui du procédé de la double entente, « c’est que ce différé peut durer plusieurs millénaires si on perd la clé. »
Car on a tout pris au pied de la lettre comme vérité historique, avec les conséquences que l’on sait par la suite : la théologie de la substitution, la thèse du Verus Israël, l’antisémitisme, les persécutions, jusqu’à la Shoah, etc. Souvenons-nous que « l’origine de la haine c’est la haine de l’origine » (Daniel SIBONY). Ou alors le refoulement (Egypte-Israël) ; la difficile coexistence abrahamique avec l’Islam.
QUELQUES CLES DE CORRESPONDANCE
- « Selon la vieille tradition juive, le messie viendra pour guérir Israël et, au passage, en passant, il rassemblera les nations, tous le peuples viendront vers lui = Inverser cet ordre ici : hâter la fin. En guérissant les idolâtres et donc en les laissant entrer, on crée les conditions midrashiques de la fin de temps. » (p. 27 - parabole du Paralytique chez Marc et Luc).
« Si le pain est la Loi, alors on va multiplier la Loi pour que tous les peuples en aient leur part. » (p.35 - parabole de la Cananéenne).
Jésus chasse les marchands du Temple : « leur expulsion est une élaboration midrashique qui traite une fois de plus de l’inversion eschatologique. Les Juifs n’ayant pas été à la hauteur de leur mission, le messie viendra pour faire entrer, à leur place, les païens. » (pp. 42 et 44).
« Judas vend Jésus. Tout comme Juda avait vendu Joseph. » (p.45)
« Après la mort de Joseph » = Ahare Mot Yosseph (cf. Paracha du même nom tirée du Lévitique) devient Joseph d’ARIMATHIE (artefact claqué sur Ahare Mot). (p 49)
NB : les amateurs de la Quête du Graal en seront pour leurs frais, dans l’histoire de Joseph d’ARIMATHIE recueillant le sang de Jésus-Christ dans la célèbre Coupe. Là encore, il se confirme que le véritable sens du Graal est à chercher du côté de la Kabbale, comme l’indique Yona DUREAU.
« Sortir = être impur ; entrer = être guéri. » (p.56) - revenir = se convertir (p. 79)
« Le Banquet est le moment de la donation de la Loi. (p. 61 - Les Noces de Cana).
« Le tombeau évoque aussi l’exil dont le messie doit faire sortir son peuple. » (p. 60)
« L’adultère = l’idolâtrie (p. 40), l’hérésie » (p. 65),
« Nida (état de menstruation de la femme) = impureté du peuple, hérésie religieuse. Cf, la femme hémorroïsse. (p. 67)
« Toutes les femmes stériles qui demandent un fils demandent en réalité un messie. » (p. 68)
« Elisheba, femme d’Aaron devient Elisabeth, femme du prêtre Zacharie, » - Miriam, soeur de Moïse devient Marie, » - Eléazar, fils d’Aaron devient Lazare, » - Itamar devient Marthe, » etc. (p. 71)
« Désert = pays sans eau, sans parole de Dieu, » - « Paralysie = incapacité à marcher droit ; état de paganisme, » - « Marcher = appliquer la Loi, » - « Cécité = incapacité des Juifs à comprendre le midrash, » - « Prostitution = attirance pour l’idolâtrie, » - « Vin = la Torah, » - « Faim, soif = désir de parole divine et de Loi, » - « Maladie, adultère = idolâtrie, » - « Vêtement = Temple, Loi. » etc. (pp. 76-80)
« Un converti change de vie, acquiert une nouvelle vie = nouvelle naissance, résurrection. » (p. 112)
« Famine rencontrée par le fils prodigue = absence de la parole de Dieu. » (p. 160)
LES OBLIGATIONS SYMBOLIQUES
Là, le Midrash devient source de vertige pour les non-initiés…
Miriam biblique, soeur de Moïse et d’Aaron, prophétesse et punie de la lèpre : (pp. 53 et 54) :
- « Selon le midrash juif, le messie doit être issu de David. Or le même midrash(et lui seul, pas la Bible) fait de Miriam l’ancêtre de David. - « Miriam figure, dans le Midrash, le peuple juif (…) Si Miriam figure le peuple juif, Jésus est logiquement le fils de Miriam. » - « Pour accomplir midrashiquement la prophétie d’Isaïe qui exige une ‘alma comme mère du messie. On arrive ainsi à un résultat inattendu : la mère de Jésus est vierge parce qu’elle est la Miriam biblique, et non pas pour des raisons et de pureté ou de tabou lié à la sexualité. »
NB : rappelons aussi que dans la tradition juive, Messianité et Virginité font bon ménage, sortant les Matriarches de leur « stérilité », telles Yokebed (mère de Moïse), Sarah, Rébecca, Rachel, en vue du renouvellement messianique par l’engendrement (3).
« Même si le messie des Evangiles est en fait Joseph vendu par ses frères » (p.169), le nom de Yeschouah (Jésus) est nécessaire pour être assimilé à Josué. « Ce n’est pas que le Josué biblique ait été historiquement le messie. Mais que le nom du messie doit être Josué. » (p. 68) « Josué est non seulement le ministre de Moïse, mais c’est aussi le guide des Judéens (le fils de Yeotsadaq) lors du retour de l’exil babylonien. » (p. 71)
NB : sur le plan de l’interprétation kabbalistique, un débat existe sur Le Nom de Dieu attribué à Yeschouah et non pas Yehoshouah (Josué), mais cela ne change pas le contenu de cette analogie.
« Ainsi, pour Philon d’Alexandrie, c’est la parabole de l’ange annonçant la naissance d’Isaac qui féconde Sarah. Abraham n’est pour rien dans cette naissance. » (p. 103) - D’où la correspondance : Ange Gabriel - Marie - Jésus (voir le Code de l’AVM).
En ce qui concerne Yeschouah Ha-Nazir :
- « En échange du don de Dieu, l’enfant est donc consacré à Dieu, il est nazir. » - « Le prophète Samuel est shaoul à Dieu (demandé à Dieu, puis obtenu de Dieu, puis consacré ou cédé à Dieu. »
- « C’est pourquoi Paul qui est (lui aussi) shaoul dit être un nazir en Ac.18,18. »
« Pourquoi Nazareth ? La racine est netser = rameau d’où sortira la souche de Jessé. Ce mot prend ici le sens de « rejeton » et contient l’idée de « sortir. » Il y aurait ici un jeu de sens sur Jésus qui « sort » de natseret, ville du « rejeton » et du « rejet. » NB : « le midrash n’est donc pas seulement créateur d’histoire, mais aussi de géographie. » (pp.170-171). CQFD. Tout le monde n’est pas d’accord sur l’existence de ce village sous Jésus.
« Nazareth, Notsèrèt, c’est aussi Nètsèr, le bourgeon (Is. 11,1) pour faire fructifier les bonnes actions : Nazîr, le consacré comme Joseph (Gn 49,26) ; Nèzèr, le diadème qui fleurira sur la tête de David (Ps. 132,18) : Nètsah, l’Eternité chantée par David dans sa foi dans la résurrection (Ps. 16, Ac.2) » (2).
Arrivé à ce niveau, on n’ose plus se demander l’ampleur de la différence entre le questionnement midrashique et la réalité historique. Elle semble bien ténue. Cependant les sources juives confirment le don de Yeschouah pour les guérisons magiques de toutes sortes, comme d’autres à cette période.
Toute la Bible confondue est un immense texte symbolique, organisateur de la croyance et de la pensée humaine dans sa dimension archétypale accomplie. L’Arbre de vie se dessine alors en creux, et non plus en plein, porteur des besoins et des espérances ultimes de l’humanité pour exister et progresser.
Nous mesurons alors le pouvoir de la religion où le vrai n’est pas tout-à-fait la même chose que le réel. A nous de rééquilibrer tout cela avec la psychologie et la raison, sinon gare. Les Idées continuent à mener le monde. Une génération meurt pour elles, une autre les consommera ou les rejettera.
Cela semble aujourd’hui évident, et pourtant le combat de la liberté, individuelle ou collective, n’est jamais terminé. Depuis le temps que l’on nous raconte des légendes, à nous de dire les nôtres…
ISAAC ET JESUS
(cf. Initiation à la Kabbale hébraïque - A.D GRAD, Ed. Rocher, 1982)
« Comme Jésus, Isaac est prêt à s’offrir lui-même en sacrifice (…)
Comme Jésus, Isaac porte lui-même le bois du sacrifice sur son dos, ainsi qu’il est écrit : « Abraham prit le bois du sacrifice, le chargea sur Isaac son fils. » (Genèse, 22-6).
Comme Jésus, Isaac comprend qu’il va être immolé. Il sait que le mont Moriah où l’a mené son père est le mont des sacrifices. C’est là que pratiquèrent Adam, Caïn et Abel, Noé et ses fils. »
Il est est bon de se souvenir de la traçabilité de la Tradition, et de l’obligation de son renouvellement. Autres temps, autres croyances,… mais l’essentiel est que le Code demeure.
LE SECOND COMMANDEMENT « TU AIMERAS TON PROCHAIN COMME TOI-MÊME »
Cette célèbre sentence appartient originellement au Livre du Lévitique (Vayikra) 19,18, dont les idées furent annoncées en -1400 av JC, et mises en forme vers -550 av JC.
Si vous en doutiez encore, la Synagogue de la rue Ste Isaure de Montmartre (75018) vous le rappelle sur sa façade.
Le célèbre HILLEL (-70 av JC, + 10 ap JC) se fait l’écho, avec les Pharisiens, et les Evangélistes ensuite à leur manière, d’une interprétation équilibrée les lois de la Torah. On peut en mesurer la liaison :
« Ne fais pas à autrui ce que tu voudrais pas qu’on te fît » (Hillel - Shabbat 31 a),
« Faites à autrui ce que vous voudriez qu’on vous fît » (Matthieu 7,2 - Luc 6,31).
Le second commandement de Yeschouah apparaît aussi dans Romains 13,9. On a aussi raconté que sa variante était « Tu aimeras ton prochain plus que toi-même. » Cela ne change pas grand-chose. Ce pur produit du judaïsme est devenu l’un des piliers du judéo-christianisme, et vecteur d’altérité. Il est sûr néanmoins que l’enseignement de Jésus l’a popularisé à travers le monde et les âges.
Rappelons aussi que « Sur les 2000 paraboles rabbiniques dont 325 environ datables des deux premiers siècles, on a relevé une trentaine de parallèles avec celles des Evangiles et une quarantaine qui y ressemblent fort. » in Hillel un Sage au temps de Jésus de Mireille HADAS-LEBEL, Albin Michel.
JESUS OU JE SUIS QUI JE SUIS
Alors que changent tous ces scoops à l’extraordinaire histoire du monothéisme ? Rien du tout. Le Christianisme a fonctionné comme une religion prosélyte de masse éradiquant l’ordre païen ancien au profit d’un autre, religieusement et politiquement correct, pour la paix des empires successifs. De plus, le contenu d’une croyance compte moins que la croyance elle-même.
Curieusement, depuis quelques années, la hache de guerre semble être enterrée entre « Jésus » et les Rabbins. On se souvient du brillant Marc Alain OUAKNIN (MAO) joutant à la Sorbonne vers 1990 avec Annick de SOUZENELLE au sujet du « fils de Dieu. » ? Aujourd’hui, MAO anime l’émission Talmudiques du Dimanche matin de France-Culture qui donne de temps en temps la juste part au Christianisme.
Quant au Rav massorti Ryvon KRYGER, il a redécouvert les vertus judaïques de l’enseignement de Saül-Paul(us), et le fait savoir. Après tout, comme disait notre brave feu Josy (EISENBERG), entre les deux prénoms, il y a juste une lettre d’écart…Etc.
Jusqu’où ira ce tiédissement des relations ? Le judaïsme attire toujours un public choisi. Un grand rendez-vous judéo-chrétien a été raté pour enseigner un ensemble de principes universels à une autre échelle. En tous cas merci à tous ceux qui, existant sans le Consistoire, le font depuis belle lurette.
Mais de là à reconnaître le christianisme primitif comme l’un des courants du judaïsme de son temps, ou la valeur du judéo-christianisme, comme l’une des plus grandes réussites spirituelles de ces 2000 dernières années, et a fortiori grâce à l’oeuvre de certains juifs, n’y pensez pas.
Pour les rabbins, le judéo-christianisme n’existe pas. Peut-être pas en temps que religion organisée, mais en temps que culture, certainement. C’est là où la mauvaise foi est grande, voire un tantinet schizophrénique. En effet, que serait la civilisation occidentale sans son apport ? Même l’Etat d’Israël en porte le fruit démocratique.
En cette période de mondialisation outrancière, on mesure aujourd’hui les pays où il fait encore bon vivre, où la démocratie reflète encore une certaine redistribution des richesses. Mais pour combien de temps ? Dès que vous quittez la zone occidentale, vous pouvez en mesurer l’écart.
Au cours de l’Ere des Poissons, de l’an 0 à l’an 2000+, cette religion devint de plus en plus chrétienne et de moins en moins juive. Elle commença à imploser au 19° siècle, après la royauté au 18° siècle, pour que la démocratie et la laïcité adviennent, puis la libération de l’individu.
Le plus beau fruit de l’enseignement de Jésus-Christ n’est-il pas justement Je suis ? A la suite de « Je suis la lumière du monde » (Jean 8,12), etc. et du lointain « Je suis ce que je suis » donné à Moïse.
L’essence de ses enseignements a été intégré à la conscience occidentale : respect et dignité de la personne, de la femme, des plus faibles, de la vie, charité et partage, etc. Intégré ne veut pas dire accompli, mais nous sommes sortis de la barbarie ; mais pas des contradictions de la condition humaine, nuance. Sa Croix en est encore le symbole parfait, mais qui le comprend encore ?
Le monde de l’information entretient une surveillance accrue au niveau mondial. On ne fait plus comme avant tout ce que l’on veut sans répercussion. Un nouvel ordre a vu le jour pour jouer l’équilibre des pouvoirs.
Hélas, cependant, depuis l’an 2000, le plus beau fleuron du judéo-christianisme, l’altérité (cf. Martin BUBER…), est en voie de disparition, ou reventilé dans une nouvelle forme de mentalité ou de pratique sociale en divers réseaux, la veille et l’alerte, etc. Après tout, « rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. » Une nouvelle ontologie, Homo Sapiens Numericus, voit le jour.
L’individualisme forcené oblige aussi à se définir, se construire, à valoir quelque chose. On s’éloigne de l’essence au profit de l’existence et de ses rendez-vous à ne pas rater, quitte à exacerber le narcissisme et la réalisation de son modèle.
La prophétie de Yeschouah s’est réalisé, le Temple a été détruit, jamais ou pas encore reconstruit. Au profit de l’équilibre personnalité-individualité face à la famille et la société, etc.
Car aujourd’hui, le temple est mon corps, la présence, mon esprit, et ma respiration, « je suis », ma prière. Désolé, mais dans la société actuelle, il y a obligation de résultats. Le yoga triomphe et pour cause, au moins pour échapper au stress. Même le spirituel devient utile, question de priorité, synonyme de développement personne indispensable pour tenir sa place.
Les religions peuvent encore suivre leur chemin, mais à quel prix ? Nous vivons le nôtre. Point. La laïcité, l’écologie, la co-création féminine, etc. ouvrent bien d’autres horizons spirituels dans l’ici et maintenant. Chacun peut désormais, selon son degré d’âme, les choisir à la carte ou les créer sur mesure.
Quand au Christ ou autre, l’énergie messianique, véritable promesse d’espérance juive et chrétienne pour l’humanité, elle continue son chemin salvateur. « Je suis » aussi face aux systèmes de tous bords.
L’Eglise catholique changera son pouvoir à partir de 2030, dit-on. Il y aura renaissance du Christianisme à l’ère du Verseau (2160), sûrement grâce aux femmes, et lors du 3° Principe, le Cycle du Saint-Esprit (4320 / 12960). Voilà bien d'autres histoires à écrire et à transmettre dans la Roue de la vie.
Merci Yeschouah, Shalom. A bientôt le Messie.
© Eric LE NOUVEL
(Photos : Wikipédia - Calligraphies © Frank LALOU).
(1) in Jésus rendu aux siens de Salomon MALKA - Albin Michel.
(2) in Un juif nommé Jésus - Une lecture de l’Evangile à la lumière de la Torah de Marie VIDAL - Albin Michel.
(3) cf. Armand ABECASSIS in En vérité je vous le dis - Une lecture juive des Evangiles (Ed.1).
(4) Mais de fait, il était loin d’être le seul à cette époque : « A vrai dire, les Pharisiens s’y étaient préparés, d’une certaine façon. Bien avant 70, « quarante années avant les destruction du Temple…les portes du Temple s’ouvraient d’elles-mêmes à tel point que RaBBaN YoHaNaN BeN ZaKKaY s’exclama devant elles : Temple ! Temple ! Pour quelle raison t’effrayes-tu ? Je sais bien que tu es destiné à être détruit. Déjà ZeKHaRiaH BeN ‘’iDDo avait prophétisé à ton endroit en disant : « Ouvre tes portes Liban et que le feu dévore tes cèdres » (Zach. 11,1; Yom 39b).
in La restauration du Judaïsme / La mystique du Talmud d’Armand ABECASSIS - Encyclopédie de la mystique juive, Berg International, 1977.